Grégory Grincourt
L'artiste : Grégory Grincourt
Grégory Grincourt vit à Calais. En 2002 il est diplômé du DNSEP de l’Ecole des Beaux Arts de Dunkerque. Ses oeuvres sont présentées lors de nombreuses expositions, en autres : en 2009 au 104 (Paris), en 2010 lors du 55ème salon international d’art contemporain de Montrouge (Paris), mais aussi au Festival international Bains numériques (Enghien-les-bains). En 2019, l’artiste expose ses travaux lors du World street design festival (Lille). Cette même année, il participe également au programme de résidences Regards d’artistes sur l’Urbanisme. Grégory Grincourt est artiste associé au Groupe A - Coopérative Culturelle.
Ses oeuvres du temps 2
4_Dark side of the moon, In progress depuis 2011, techniques mixtes, dimensions variables.
L’accumulation d’objets manufacturés en plastique, simplement assemblés en fonction de leur potentiel formel, de leur concordance colorée, de leur plasticité, et doté d’un système d’éclairage interne, nous présente des luminaires au design étonnant, de la même manière que d’autres peuvent être proposés au consommateur dans n’importe quelle grande surface. Néanmoins, chacun sait que les objets en plastique sont un véritable fléau pour la planète. On s’en débarrasse à la volée, objets sans réelle valeur, issus de la consommation de masse. Ils se désagrègent très lentement et ne perdent absolument pas leur nocivité toxique une fois réduits en milliards de micro-particules, qui hantent désormais l’ensemble des mers et des océans.
5_Thingummyjigs, 2020, techniques mixtes, dimensions variables.
Cette œuvre, inspirée des figures totémiques de l’Afrique et des divinités protectrices, opère un retournement de sens à partir de déchets automobiles. Elle présente en effet quatre faces d’insectes tératologiques, qui, il n’y pas si longtemps, finissaient leur course sur les pare-brises automobile, et, malgré leur extinction vertigineuse (30% des insectes sont menacés de disparition, Biological conservation, 2019), pourraient nous survivre pour une partie d’entre eux. Par ailleurs, ces machines sonores nous renvoient à la pollution dont le trafic autoroutier fait preuve, en envahissant de grondements véhéments les espaces urbains comme ceux de la campagne, et finissant éparpillés aux quatre coins du monde. Comme chacun le sait, de la route à la décharge, il n’y a qu’un pas…
7_Chicxulub 2, 2020, bois brulé, plantes artificielles, ampoules LED, 2,80m x 5,30m.
Assisté de Pascal Marquilly
Œuvre réalisée lors d’une résidence de création collective à la Condition publique du 28 septembre au 16 octobre 2020. Les matériaux ont été puisés localement au sein de l’atelier de la Halle C.
Le cratère de Chicxulub, situé dans la péninsule du Yucatán au Mexique présente un diamètre d’environ 180 km. Provoqué par la chute d’un corps céleste libérant une énergie estimée à 5 milliards de fois la bombe atomique d’Hiroshima, il est le vestige d’une catastrophe naturelle survenue il y a environ 66 millions d’années. Cette dernière est considérée comme étant probablement l’événement majeur ayant provoqué une chute brutale de la biodiversité sur terre, et notamment la disparition rapide des dinosaures, marquant la fin du Crétacé. Ceux-ci connurent pour autant une évolution considérable durant près de 170 millions d’années et fascinent aujourd’hui plus que jamais les publics ; la reconstitution des squelettes de ces colosses dans les musées d’histoire naturelle étant une attraction majeure. Un squelette de Tyrannosaurus rex, nommé Stan, fut d’ailleurs vendu à un particulier, lors d’une vente aux enchères chez Christie’s à New York le 6 octobre 2020, pour la modique somme de 31,8 millions de dollars. Qu’une personne puisse s’arroger, par un chèque aussi conséquent soit-il, une partie du patrimoine de l’histoire du vivant sur Terre posera autant de questions que les reproductions de dinosaures en plastique emplissant les coffres de nos bambins, comme autant d’appropriation d’un monde révolu, dont en fait on ne connaît pas grand-chose. Cette œuvre, présentant un squelette modélisé et brûlé, inspirée des maquettes 3D, suggère peut-être que nous devrions reconsidérer notre rapport aux rares connaissances portant sur le vivant que nous glanons ici et là, et dont on limite trop souvent la portée à leurs simples représentations, plutôt que d’en penser les interconnections nombreuses avec notre présence sur Terre.
12. Hellmet, in progress depuis 2015, technique mixte, dimensions variables.
Voilà une collection d’entités improbables et naturalisées, toutes plus customisées les unes que les autres, présentées comme l’on présente les massacres, d’ordinaires cerfs, sangliers, lions, tigres, comme autant de trophées ou d’ornements rappelant les heures de gloire d’une chasse à courre ou d’un safari rondement mené. Pour autant, ici les figures nous faisant face semblent indéniablement nous observer d’un autre temps, peut-être très ancien ou peut-être futuriste ? On pensera rapidement à la pop culture japonaise, entre autres les séries improbables présentant des héros post apocalyptique, comme San Ku Kaï, X-Or, Kyojuu Tokusou Juspion, Ultraman, Bioman, etc., mais aussi et évidemment à Godzilla ou autres Kaijū, forces de la nature devant laquelle l’homme est désarmé. On pensera aussi aux gangs de motards japonais sévissant dans les années 70, les Bōsōzoku qui modifiaient largement leurs motos et sévissaient surtout sur les routes, selon un code strict, pour éprouver la vitesse et se confronter au risque et à la mort. Malgré ces références, cette œuvre expose une poésie de l’assemblage et du collage, emprunt certes de cultures populaires, mais exposant des prosôpon (Masque et visage, lire à propos le livre de Françoise Frontisi-Ducroux, Du masque au visage, aspect de l’identité en Grèce ancienne) indéniablement divins dont on ne peut se saisir, ni y croire à proprement parler, seulement se laisser dominer par une sensation enfantine de vouloir en faire autant !
Ses oeuvres du temps 1
Bonne Année , 2020, pneu et polyuréthane, dimensions variables.
Good year, marque mythique américaine de pneu, ici renvoyée à la couronne de buis ou de houx suspendu lors des fêtes de fin d’année, nous souhaitant ironiquement une bonne année. On se souviendra des grèves violentes qui ont émaillés entre autres les usines françaises du groupe de 2007 à 2016. C’est aussi un cancer du pneu, une excroissance maladive qui enserre le caoutchouc et les fibres composites, et se déploie allègrement dans l’espace. Peut-être celle-ci ne s’arrête pas, est-elle en croissance infinie ? L’œuvre fait un clin d’œil paradoxal aux récifs coralliens qui eux aussi sont mis à mal par la pollution toujours plus étendue des océans, mais rappelle d’une part que ces polypes sont des superorganismes, formant les plus grandes structures crées par des organismes vivant et d’autre part que leurs actions de filtration de l’eau saline est essentielle à l’oxygénation des océans.
Crédit photo : Yves Bercez
Freaky Food , 2020, impressions sur film adhésif rétro-éclairable sur caisson lumineux, dimensions variables.
C’est un jeu, chaque jour renouvelé à partir de la nourriture, pour faire rire son enfant, lui apporter un rapport ludique à l’alimentation, entre imaginaire et sustentation, auquel nombre d’entre nous se sont adonnés. Mais ici, le jeu prend une tournure particulièrement perverse, puisque les éléments proposés font référence à la junk food plus qu’à la grande gastronomie. On remarquera tout de même que les repas proposés sont presque toujours équilibrés, mais qu’ils sont néanmoins clairement issues de l’industrie de la bouffe, de la transformation à outrance des aliments à un tel point qu’ils sont totalement déconnectés des cycles naturels.
Crédit photo : Yves Bercez
Bang Bang , 2016, série de 3 cibles de la gendarmerie nationale, impacts de fusil de précision FR-F1 sur papier.
Ces œuvres furent réalisées par un tireur délite du GIGN, placé à 250m de la cible. Il dessina à l’aide des balles, et sous l’impulsion de l’artiste, des smyle, l’émoticône la plus célèbre des internautes. Elles font référence au concept de violence légitime de l’état, pensée par Max Weber. Celle-ci peut être nécessaire pour protéger les populations. Mais protège t-on les populations lorsque les manifestations sociales sont le théâtre de dérapage de violence policière ? Peut-on vraiment légitimer l’usage d’armes non létales mais pour autant parfois particulièrement dévastatrice ? On ne compte plus les éborgnés, les mains arrachés, les traumatisme en tout genre. Et que dire que de savoir qu’un corps armé de l’état tout entier voué à la protection intérieure puisse être dotée d’une telle force de frappe à distance ? Une confusion des genres dira t-on…
Crédit photo : Yves Bercez