Pascal Marquilly
Son entretien
"Le titre de l’exposition, « Ibant obscuri » fait référence à un passage emblématique de l’Enéide de Virgile : Ibant obscuri sola sub nocte per umbram, dont la traduction la plus poétique à mon sens serait celle de Paul Veyne : ils allaient obscurs, dans la nuit solitaire, à travers l’ombre. Le livre 6 nous raconte la descente aux enfers de Enée, accompagné par la Sybille, et la traversée des différents états de ce monde souterrain, interdit aux vivants. Il y rencontrera son père, Anchise, qui lui dévoilera la lignée des ses descendants, et les futures gloires romaines. L’expansion de Rome apportera la paix sur terre… C’est aussi un clin d’œil à Guy Debord.
13_ Pascal Marquilly
Qu’ils crèvent les artistes, 2020, catalogues d’artistes découpés au format 10,5 cm x 21 cm, serre-joints.
Œuvre réalisée lors d’une résidence de création collective du 28 septembre au 16 octobre 2020. Les matériaux ont été puisés localement au sein de l’atelier de la Halle C.
Le catalogue d’artiste est le Graal, faisant suite à une exposition et assurant une continuité, une série de traces du travail réalisé, d’autant que la plupart des œuvres finissent parfois pour les plus chanceux ou les plus pugnaces chez un collectionneur, dans un musée, mais très souvent dans les réserves d’une galerie et plus souvent encore dans un quelconque débarras attendant la fin des temps. Rares sont les artistes contemporains bénéficiant après leur mort d’une exposition régulière de leurs œuvres, et beaucoup d’entre elles finissent au rebus, ou conservées précieusement par quelques obscurs afficionados. Le sort des catalogues n’est pas étranger non plus à ce destin malencontreux. Le marché de l’art régule bien évidemment les postulants à la postérité de la même manière que la censure politique ou sociétale intervient encore bien trop souvent pour éteindre les voix de la pluralité que l’on peut rencontrer dans les formes d’arts, ou plus directement pour clore définitivement les débats. Il s’agit aussi plausiblement d’un regard posé sur l’effondrement à venir de la culture, en ce qu’elle disparaît lentement des sphères d’influence et particulièrement en ce moment de restrictions sanitaires. Le titre de l’œuvre est un clin d’œil à une pièce théâtrale du dramaturge et metteur en scène polonais Tadeuz Kantor, et selon les mots de l’auteur : «Dans cette sphère de la mort, il arrive que sur cette image de l’œuvre d’art de cette expression la plus noble de l’esprit humain, s’impose impitoyablement le cliché de la prison et de la torture.»
19_ Pascal Marquilly, François Andes
Per aspera ad astra, 2019, dessin au graphite sur papier Gerstaecker, 120 g. 50 cm x 32,5 cm, 20 planches.
Cette série de dessins originaux a été réalisée en vue d’une édition ou chacune des planches serait imprimée selon des procédés différents. Pascal Marquilly invita dans son processus de création François Andes. La réalisation des images fut l’occasion d’une collaboration ouverte, d’aller-retour collaboratif, où Pascal Marquilly projeta la mise en scène de l’ensemble tandis que François Andes réalisa les planches de tête. Les déclinaisons des différentes pièces, réalisées par Pascal Marquilly racontent, chacune à leur manière, une histoire de la disparition animale. Le processus de création intégra huit nouvelles écrites par Pascal Marquilly.
20_ Pascal Marquilly, François Andes
Per aspera ad astra, 2020, différentes techniques d’impression sur papier Arches expression, 46 cm x 32,5 cm, 22 planches.
Per aspera ad astra, vers les étoiles, à travers les épreuves, tente de rendre compte d’un véritable génocide invisible : la disparition d’une bonne partie du règne des vertébrés (entre 1970 et 2018, 60% de la population des vertébrés a décliné). Il est évident que lorsque nos enfants, d’ici une petite dizaine d’année, ayant des enfants à leur tour et feuilletant un livre d’images animalier, s’adresseront à leur progéniture de telles manières : c’était une baleine, c’était un éléphant, c’était un tigre… L’œuvre est conçue dans la pure tradition des images animalières du XVIIème siècle où l’on esquissait une représentation animale par les récits qu’il nous était donné d’entendre. Les deux artistes se sont interdits de prendre modèle et ont dessiné les animaux de mémoire. Les planches sont composées en petites séries, se répondant les unes aux autres et intégrant des techniques d’impression qui ont été choisies selon qu’elles pouvaient aussi rendre compte de cette disparition malheureusement programmée, à notre insu. La délicatesse des réalisations tranche volontairement avec la gravité de la situation. Il s’agissait de réaliser un dernier inventaire entièrement voué à prendre place dans une archive muséale. L’ensemble des impressions fut réalisé, sous la supervision des artistes, par l’Atelier du Livre d’art et de l’Estampe de l’Imprimerie nationale.
21 _Pascal Marquilly, François Andes
Edition Per aspera ad astra, 2020, 22 différentes techniques d’impression sur papier arches expression,
accompagné d’un livret présentant 8 nouvelles illustrées d’estampes, présenté dans un coffret de conservation en carton musée rembordé de toile Buckram et papier barrière à ph neutre.
22 _Pascal Marquilly
Per aspera ad astra, 2020, édition spécifique de 8 nouvelles, séparée d’un carton orange, à disposition du public.